Hôtel Relais de Morcote, Vico Morcote
,
Suisse
Publié le 04 mai 2020
Sergio Calori Studio d'architettura
Données du projet
Données de base
Données du bâtiment selon SIA 416
Description
Entre colline et eau
Située en limite du bourg de Vico Morcote, cette ancienne maison a fait l’objet d’une réhabilitation et d’une rénovation. Sans déroger à son patrimoine architectural, le bâti s’adjoint d’un nouveau volume résolument contemporain dont l’aspect tranche avec l’existant.
À environ 10 kilomètres de Lugano, en suivant un itinéraire par route ou par bateau, on rejoint le village pittoresque de Vico Morcote. Perché à 442 mètres à flanc de coteau entre le vignoble, il surplombe le lac. La commune d’environ 400 habitants possède un patrimoine historique composé de ruelles étroites et d’arcades datant du XVIIe et XVIIIe siècle. Grâce au dénivelé topographique abrupt, on peut jouir d’une vue panoramique. L’ancienne maison est située à l’orée du bois, à l’extrême sud de la commune. La structure date du XVIIIe et, selon les archives locales, elle aurait abrité à l’époque un couvent. Depuis, elle a connu différentes occupations, la dernière en date une école privée d’architecture.
Mais le Palazzo inscrit comme bien culturel local, reste fermé durant quelques années. Jusqu`à l’achat en 2009 par une famille amoureux du lieu. Les nouveaux propriétaires souhaitent transformer ce petit joyau architectural en un hôtel de charme. Pour profiter des possibilités qu’offre la structure, ils décident de rénover le bâtiment dans son entier adossé d’un jardin et sa vue orientée sud inscrite dans la pente douce du terrain. Le mandat est confié au bureau d’architectes tessinois Sergio Calori. Toutefois, la commission du paysage a imposé la préservation du bâtiment. Il faut donc respecter une série de règles. Pour cela, les interventions conservent autant que possible le lieu. D’ailleurs des accords ont dû être trouvés entre la commission et les souhaits du maître d’ouvrage. La parcelle est organisée selon une disposition traditionnelle et le bâti se pose en sentinelle à l’angle de la route. Le corps du bâtiment rectangulaire offre un volume total de 3021 mètres cubes répartis sur trois niveaux et d’un rez-de-chaussée dans lequel un petit restaurant occupe une partie du volume. Ce dernier n’a pas cessé son activité lors des travaux et n’a été que très peu modifié. Si l’entrée externe est indépendante, elle est reliée au reste de l’habitat par un passage interne.
«Corriger» le passé
Lorsque le projet démarre en 2015, les architectes ont en main un bâtiment à l’apparence générale saine. Les travaux démarrent en 2017, mais rapidement, il faut renforcer les structures porteuses. Et même si quelques interventions ont été entreprises par l’ancien occupant, le toit, par exemple, a été intégralement remplacé et refait à neuf. Ici et là, des éléments d’origine se dévoilent. L’architecte et son équipe, sensibles à l’impact du bâtiment dans le proche environnement poussent la rénovation jusqu’au moindre détail. Cette préoccupation les a d’ailleurs amenés à s’interroger sur le traitement des façades. Rafraîchies, repeintes et valorisées, elles retrouvent leur éclat. À l’intérieur, l’habitat est restauré dans son ensemble. Tous les espaces ont été revus, et au premier étage des nouvelles divisions ont dû être aménagées. Dans un langage plus contemporain, l’architecte a réinterprété le vocabulaire du lieu. En tout, l’établissement compte douze chambres avec salle de bain distribuées dans les différents étages. Chaque pièce offre un concept et des variations différentes; quelques vestiges réapparaissent alors que la décoration est signée par une architecte d’intérieur. Un point d’honneur pour la grande salle de séjour. Emblématique du lieu, elle est coiffée d’un plafond à caisson d’origine qui se marie à la scénographie de la pièce.
Une extension habillée en acier Corten
Pensée en amont et pour créer une unité architecturale, les concepteurs proposent une nouvelle extension externe habillée en acier Corten qui est bien acceptée par la commission du paysage. De forme angulaire, elle se développe sur deux niveaux. À l’intérieur, l’espace ouvert mais couvert offre un écran géant naturel sur l’extérieur. Au deuxième étage et grâce à cette extension, il a été possible de réaliser une chambre suite. Par la même occasion, ce nouveau volume augmente les mètres carré existants alors que simultanément, il établit un lien direct et fort avec le paysage champêtre. Invisible depuis la route, il ne semble pas troubler car il faut rentrer dans la parcelle pour le voir. La construction n’est pas en rupture totale avec le contexte. Ses proportions et ses lignes sont calculées attentivement en fonction de la topographie du bâtiment. «Il fallait perturber le lieu le moins possible», commente l’architecte Segio Calori. Ainsi, la seule altération a consisté à «renflouer» un vide existant. Le volume imaginé «se glisse» donc comme un caisson dans ce renfoncement et ménage un espace qui sert comme une lounge room ou salle de repos. Sans fenêtre, ce volume offre une vue sur le paysage, un grand écran naturel. Il n’existe pas de distance entre l’ancienne habitation, où sont regroupées toutes les chambres et l’extension proprement dite. En effet, les clients passent à leur gré entre les deux volumes en empruntant un couloir intérieur. L’échelle et la géométrie facilitent son inscription dans le paysage, tandis que sa peau produit un contraste saisissant avec le reste de la maison. Cette transition avec le cadre rural permet d’afficher progressivement un élément de modernité.
du Studio Calori Architetti sur les plaques d’acier corten non traité:
«Grâce à ses qualités de surface, l’acier corten favorise une combinaison adéquate avec des bâtiments historiques. C’est aussi un matériau qui se prête à différents procédés, ce qui le rend polyvalent, durable et 100 pour cent recyclable, car il est naturel. Il représente le nouveau qui, en vieillissant, dialogue avec l’histoire du bâtiment.»
Sergio Calori Architecte du Studio Calori Architetti sur le plâtre et vernis dans la configuration de la façades
«L’intention initiale était de conserver le crépi d’origine sur les façades historiques du bâtiment datant du XVIe siècle. Il a été possible de reconstituer des mélanges spéciaux de sable et de plâtre et enduire les murs manuellement avec la même technique du passé. En tout, quatre différentes strates se superposent sur les façades du Palazzo. Un vernis à base de chaux reproduit fidèlement la finition historique.»
Texte: Renzo Stroscio
Première publication: Magazine de la Documentation suisse du Bâtiment 2019 - 6