Habiter la poste de la Madeleine

Dans une réflexion presque vitruvienne, l’architecture de la nouvelle Poste de Rive s’inspire du 19^ème siècle et dialogue avec les immeubles voisins, instaurant ainsi un ordre architectural en cohérence avec son contexte. Le bureau de poste occupe l’ensemble du rez-de-chaussée ainsi que le premier sous-sol, tandis que les bureaux prennent place au premier étage. Les cinq niveaux supérieurs sont quant à eux dédiés aux logements. Cette organisation met en avant un piano nobile aux deux premiers niveaux, soulignant l’usage public du rez-de-chaussée. Un ordre monumental s’exprime par deux arcades aux colonnes massives, qui signalent les entrées du bâtiment. Leurs angles chanfreinés invitent à pénétrer à l’intérieur par un mouvement de glissement subtil. En attique, les hauteurs sous plafond sont augmentées afin de marquer le couronnement du bâtiment.

La typologie adoptée confirme la forme urbaine en barre en proposant des logements traversants. Avec une profondeur de 12,5 mètres, le plan révèle une forte dichotomie entre la rue et la cour: les chambres sont orientées au nord, côté cour, tandis que les espaces de jour se déploient côté rue, au sud. La cuisine, placée au centre de la configuration, structure l’ensemble du plan. Conçue comme une cuisine laboratoire, typiquement genevoise, elle s’ouvre à mi-hauteur sur l’espace de jour, assurant ainsi une continuité visuelle entre les deux façades. Côté rue, la façade exprime une matérialité minérale marquée, animée par un jeu subtil de reliefs et d’apparences, à la fois audacieux et discret. Ce travail de texture et de lumière insuffle au projet une vibration perceptible en perspective, jouant sur les ombres et les reflets de manière parfois insaisissable. Les éléments en béton préfabriqué gris-vert, polis ou laissés bruts selon leur position, rappellent la pierre calcaire des façades voisines, créant une continuité matérielle sans pastiche. En s’alignant au millimètre près sur la limite constructible, les étages sont dotés d’étroits balcons qui avancent légèrement sur la rue, en écho aux bow-windows de l’immeuble du Vieux Collège situé en face. Cet effet de miroir est renforcé par un rythme similaire en façade. Ainsi, selon l’angle d’observation, le bâtiment semble appartenir à une autre époque ou, au contraire, se révèle et affirme sa contemporanéité.

Ce projet a été soumis par Bakker & Blanc au Arc Award 2025 et publié par Sabrina Hobi.