Nouvelle salle de paroisse
,
Suisse
Publié le 01 juillet 2020
Joos & Mathys Architekten AG
Participation au Swiss Arc Award 2021
Données du projet
Données de base
Données du bâtiment selon SIA 416
Description
La nouvelle salle de paroisse de Rüti est un mélange
de formes analogiques. Elles se réfèrent autant au kiosque à fleurs de Sigurd Lewerentz et à la petite maison de Pascal Flammers qu’aux bâtiments des alentours, implantés dans un contexte hétérogène. La petite construction parvient ainsi à être autonome tout en étant ancrée dans son environnement.
L’église réformée de Rüti, située dans le canton de Zürich, avait besoin d’une nouvelle salle de paroisse. Le périmètre de l’ancien couvent, situé au centre du village, est aujourd’hui composé d’un mélange de plusieurs époques. Certaines constructions revêtent d’une importance historique comme l’église dont la construction remonte au 13ème siècle, l’ancien presbytère, l’ancienne petite laverie et les vestiges de l’ancien mur d’enceinte. La dispositions de ces éléments est toutefois aujourd’hui quelque peu brouillée à cause d’un parking en plein air et de logements des années 1970 qui viennent perturber l’ensemble historique. De plus, des grandes halles industrielles se sont implantées très proches du périmètre historique et viennent ajouter un caractère étranger au lieu. Les architectes Joos & Mathys et Daniel Nyffeler se sont lancé le défi d’implanter la nouvelle salle baptisée Tüchel, dans ce contexte plutôt troublant et de restaurer l’ancien presbytère, ce qui n’était pas gagné d’avance.
Différents mais pareils
A première vue, rien ne semble relier la nouvelle salle de paroisse aux bâtiments des alentours. Cependant, rien ne choque, rien ne dérange, comme si tous ces éléments, finalement assez différents les uns des autres, avaient trouvé un langage commun. Le nouveau volume s’intègre naturellement dans l’ensemble existant. Son toit à un pan communique avec les halles industrielles voisines, mais ne jure pas avec les bâtiments historiques, notamment grâce à sa couverture en tuile. Côté jardin, la gouttière du toit est amenée très bas, afin de générer une petite échelle qui ne rompt pas avec le contexte et qui génère un espace intime dans le jardin. Le faîte, quant à lui, s’élève avec assurance pour donner au bâtiment une forte présence vers la place. Toujours vers le sud, les architectes ont ajouté un volume couvert d’un second toit à un pan comprenant des espaces de service. On y trouve une cuisine, un escalier menant au le sous-sol et une zone d’entrée couverte mais ouverte structurellement.
Des piliers en béton surdimensionnés soutiennent la dalle de la toiture et donnent une certaine massivité au bâtiment. Et en même temps, les baies vitrées côté jardin lui confèrent une légèreté surprenante.
L’origine de la forme
Daniel Nyffeler explique que la forme du bâtiment est issue de beaucoup de croquis et de tests, mais qu’elle est également inspirée de deux références: le kiosque à fleurs de Sigurd Lewerentz construit en 1969 dans le cimetière de Malmö, et la maison de Pascal Flammer construite en 2012 à Balsthal. Effectivement, on peut remarquer quelques similitudes. Par ex-emple, la toiture, inspirée du kiosque à fleurs, comporte également un faîte surélevé. Celui des architectes de Rüti est en revanche bien plus haut que celui de Lewerentz. Mais la forme du bâtiment n’est pas parfaitement identique et selon Daniel Nyffeler, l’élévation de ce faîte était nécessaire pour des questions d’équilibre de la façade. Les longues fenêtres en façade nord-est, semblent quand-à elles être inspirées de la maison de Pascal Flammer. La combinaison de ces deux références ainsi que le contexte existant a donc généré un mélange de formes et de matériaux formant aujourd’hui le nouveau bâtiment.
Douce ambiance
Afin de minimiser l’impact au sol, les architectes ont placé les salles de groupe en dessous de la salle principale. Les piliers en béton sont creux, et grâce à des oculi elliptiques, ils amènent une lumière zénithale au sous-sol. Mais ils permettent également de zoner la salle principale du rez-de-chaussée. Sa grandeur peut effectivement être adaptée grâce à des rideaux.
À l’image de la maison de Pascal Flammer, le banc intérieur, est habilement placé par moment à la hauteur du terrain extérieur, ce qui crée une relation directe avec le jardin. Cet effet est accentué par les grands vitrages aux formats horizontaux. L’environnement vert extérieur est donc ultra présent à l’intérieur. Les ouvertures verticales en façades sud-ouest amènent quant à elles une belle lumière plongeante dans la salle.
Mais l’un des points les plus impressionnants en entrant dans la salle, c’est l’acoustique. Malgré la forme géométrique désavantageuse du toit, les architectes ont réussi à maîtriser cela de manière impressionnante. Des bandes prismatiques en tressage recouvrent tout le plafond. En dessous, des absorbeurs cachés assurent une acoustique parfaite dans la pièce. La couleur des éléments en tressage est assortie au bois du parquet et confère à la salle une ambiance chaleureuse.
L’ancien presbytère
La seconde partie du travail des architectes a été de restaurer l’ancien presbytère du 14ème siecle, qui est utilisé comme bureau de l’église réformée. Il s’agit là de la plus ancienne mais de la commune de Rüti. Les ajouts ultérieurs à la substance d’origine du bâtiment ont été soigneusement enlevés. Aujourd’hui la sensation d’avoir retrouvé les espaces authentique de l’époque est bel et bien là. Les architectes n’ont effectués de grosses interventions seulement là où il le fallait vraiment, et celles-ci restent discrètes et bien intégrées. Un ascenseur a par exemple été ajouté ainsi que des portes coupes feu à chaque étage. Certaines autres petites touches comme les cuisines, les luminaires ou les peintures complètent le bâtiment, toujours de manière très harmonieuse.
Un nouvel ensemble
La nouvelle salle de paroisse réussit à être à la fois un bâtiment autonome et contemporain et un subtil médiateur. Elle tisse un dialogue entre les bâtiments de différentes époques sur le site de l’ancien couvent. Même les maisons d’habitation des années 1970, qui semblent un peu banales et décalées, parviennent à s’intégrer. C’est cette simultanéité entre obstination et sensibilité qui fait de la salle de paroisse un bon exemple de la force de l’architecture analogique.
Texte: Valentin Oppliger
Première publication: Arc Mag 2.2022
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