Transformation d'une maison individuelle

 
8303 Bassersdorf,
Suisse

Publié le 23 août 2022
Stefan Wülser Architektur GmbH
Participation au Swiss Arc Award 2023

La lucarne allongée semble «se prolonger» dans l’avant-toit pour s’écarter de la façade comme un tablier. Source de lumière et d’ouverture, l’élément devient ainsi protection pour l’entrée. La forme inhabituelle  des pignons résulte de  la toiture papillon et rappelle les édifices d’Alvar Aalto. Une nouvelle poutre en H en acier indique que le mur a été enlevé. La cuisine, la salle à manger et  le séjour ont été réunis en une seule pièce. La cheminée définit néanmoins deux zones. Au rez-de-chaussée,  le mur est recouvert de miroirs. Cela crée une impression d’espace, même dans le corridor. Tel un canon à lumière, la lucarne laisse entrer une douce lumière du nord et guide les regards vers la forêt.

Données du projet

Données de base

Situation de l'objet
8303 Bassersdorf, Suisse
Catégorie de projet
Achèvement
01.2020

Données du bâtiment selon SIA 416

Étages
de 3 à 5 étages
Nombre de sous-sols
1 étage
Nombre d'appartements
1
Surface de plancher
174 m²
Volume bâti
753 m³

Description

Pour la transformation d’une maison individuelle datant des années 1930, Stefan Wülser a choisi de mettre en valeur les choses simples et quotidiennes. Le projet n’en est pas moins, et pour cette raison peut-être, puissant et dégage une énergie positive. Conçu sur mesure pour une famille, il met en oeuvre des solutions apportant une grande plus-value avec un minimum d’efforts.

La maison individuelle alimente les débats. Une majorité de personnes la considère encore comme la meilleure forme d’habitat. Le gaspillage de terrain, le manque d’infrastructures publiques et les longs trajets dans les quartiers de villas ne sont que quelques-uns des nombreux inconvénients par rapport aux formes d’habitat plus dense qui font d’elle un type de plus en plus critiqué. Mais même si l’on réduisait et empêchait à l’avenir leur construction, que faire des innombrables maisons déjà existantes? La Suisse en compte un million. Une fois vendues ou léguées, elles sont souvent remplacées. Une transformation est onéreuse, ou les nouveaux propriétaires les trouvent formellement et spatialement désuètes.
Le constat est là: le remplacement de maisons individuelles entraîne le gaspillage d’immenses quantités de matière grise. Est-ce vraiment nécessaire? À Bassersdorf, Stefan Wülser a transformé pour une famille une maison datant des années 1930, et démontre qu’il est possible de tirer parti du potentiel architectural et spatial d’une maisonnette sans attributs particuliers, et avec des mesures simples.

Magie nordique
À Bassersdorf, le quartier Schatzacker se situe à proximité d’une zone boisée de loisirs. La situation en pente offre aux maisons une vue magnifique et un ensoleillement important. Le lotissement a été construit à partir des années 1920 pour les cadres supérieurs des industries avoisinantes. La composition hétérogène rappelle le charme d’un camping méditerranéen.
Une famille a hérité d’une petite maison qui surplombe les autres en lisière de forêt. En réfléchissant à son réaménagement, la famille a hésité entre de petites interventions (comme l’ouverture de la cuisine sur le séjour) et l’idée de son remplacement par un nouveau bâtiment. Mais après plusieurs études, des questions budgétaires ont imposé une transformation. Autre détail important: le bâtiment existant ne respecte pas la distance légale à la forêt. Seule une transformation permettait de conserver l’emplacement et la taille de la maison, à la faveur de la garantie d’existence. Le sous-sol existant et les murs du rez-de-chaussée ont été conservés et supportent un nouvel étage en maçonnerie repris par quelques poteaux en béton. À l’origine, un toit en croupe abritait des pièces au plafond bas. Peu conventionnelle, la nouvelle toiture renverse la tendance. Le point le plus bas est situé au milieu: deux toits en appentis inclinés vers l’intérieur et de différentes hauteurs forment une toiture à deux pans relevés qui rappelle le profil d’un papillon. Un bandeau de fenêtres long de 13 mètres orienté au sud-ouest et une lucarne pointant vers le nord-est permettent à la lumière d’y pénétrer abondamment. Inhabituelle, la forme rappelle une maison en montagne et la modernité scandinave – par exemple l’hôtel de ville de Säynätsalo, un projet de Alvar Aalto.

Twists
Le sous-sol avait auparavant fait l’objet d’un réaménagement doublant sa surface. Pas de changement pour ce niveau qui conserve sa fonction de logement indépendant. Alors que la vie s’y déroule à l’horizontale, la maison semble «pousser dans les arbres» à partir du rez-de-chaussée. La nouvelle apparence dynamique de la maison laisse présager de propriétaires jeunes et curieux. La toiture n’est pas la seule à ouvrir ses pans en direction de la vallée et de la forêt. Deux nouveaux avant-toits donnent également l’impression que l’édifice se «dresse», au sens littéral du terme.
Une sous-construction en profilés d’acier galvanisé fait saillir le revêtement de façade en plaques d’Eternit ondulé et génère ainsi une protection contre les intempéries, les feuilles et les nuisances sonores. Au-dessus, les marquises à projection beige clair des fenêtres renforcent cette gestualité d’expansion vers l’extérieur. Les fenêtres qui s’ouvrent vers l’extérieur peuvent également être relevées.
L’architecte a également trouvé des solutions pragmatiques pour la réalisation des travaux de ferblanterie. Celles-ci sont le résultat d’une collaboration avec le couvreur. Un détail sobre et soigné a pu en particulier être développé pour le prolongement de la longue lucarne en toiture sur la façade nord.
Après transformation, le volume homogène de la la maison s’est mué en un montage performatif de différents éléments de façade qui établissent des rapports à l’environnement. La polysémie qui se dégage des nouveaux éléments est telle qu’ils en deviennent presque autonomes.

Dynamisme dans la statique
La structuration longitudinale existante du rez-de-chaussée a été reprise pour les pièces de jour. Alors que les pièces servantes situées côté forêt ont vu leur taille diminuée, un grand hall habité rassemble cuisine, séjour et salle à manger. Le meuble de cuisine bleu foncé qui court le long du mur ouest abrite un sideboard et des rangements: une solution intelligente qui conjugue sans artifice la cuisine et la salle à manger. Discrètement, des éléments créent par ailleurs des zones dans le grand espace. Un rapide coup d’oeil à la coupe suffit pour comprendre que la structure porteuse du nouvel étage supérieur est aussi organisée longitudinalement.

(A-) Romantique
En 2017, la transformation d’une maison individuelle construite dans les années 1930 à Windisch par Stefan Wülser (alors associé à Nicolaj Bechtel) avait déjà suscité beaucoup d’intérêt. L’attitude claire formulée alors mettait déjà la modestie, l’efficacité et l’économie au centre de leur démarche. Stefan Wülser n’adopte pas une position romantique ou nostalgique par rapport à l’existant et n’a pas peur d’affirmer les transformations. Ces deux projets sont aussi la preuve d’un amour de l’artisanat et d’un respect du déjà-là. Dans l’existant comme avec les nouveaux éléments ajoutés, il a fait ressortir les petites choses du quotidien comme autant de qualités. C’est aussi pour cette raison que ses projets n’ont rien d’austère mais dégagent au contraire un optimisme réjouissant. Ils montrent une solution exemplaire dans l’attitude à adopter face au grand nombre de maisons individuelles vieillissantes en Suisse et ailleurs.

Texte: Claudia Frigo Mallien

Traduction en français: François Esquivié

Première publication: Arc Mag 4.2022

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