Aménagements de places à Vernayaz VS

92 von 3771

 
1904 Vernayaz,
Suisse

Publié le 12 octobre 2020
GayMenzel Sàrl

Place du Centenaire Place du Pas Superpositions. Rassemblement d’élements caractéristiques des paysages du Bas-Valais:  un étang, quelques aulnes, la montagne, un  muret, une église et un relief avec trois saints. Réajustement: un bas-relief réalisé pour une fontaine  par le sculpteur Casanova de Monthey et trouvé sur le flanc de l’église est replacé dans  le mur telle une spolia. Une casquette en pierre sculptée  le protège désormais des intempéries. Evolution: l’eau change quotidiennement le visage de la place, les aulnes le modifie plus lentement mais durablement.  Ici deux ans après leur mise en terre, à l’automne 2016. Signifié et signifiant: les bancs en  béton poncé de ciment blanc additionné d’agréagats blancs et de marbre du  Jardin du curé invitent au repos éternel. Communication visuelle:  sans avoir la précision d’une visualisation réaliste, le collage développé par les architectes lors de la phase de conception donnait une vision très proche de l’atmosphère du projet une fois achevé. Érables rouges et pins sylvestres procurent une ombre basse  et protectrice à l’espace public. Un bandeau  de pavés en granit blanc livrés par la carrière de Bramois resserre les arbres et les rassemble à la manière d’un bouquet. Perméabilité ponctuelle: le sol sablonneux aux  pieds des pins syvestres contraste avec les enrobés qui recouvrent très majoritai-rement le sol. Résence de l’eau et place publique: une fontaine double abreuvée en eau par deux élégants becs  en laiton complète le mobilier de la place du Pas. Lampadaire BEGA 7141 Enrobés divers

Données du projet

Données de base

Situation de l'objet
1904 Vernayaz, Suisse
Catégorie de projet
Achèvement
01.2014

Description

Deux places. Deux concepts

Le Hat-trick se fait attendre. Entre 2012 et 2014, le bureau Gay Menzel réalise coup-sur-coup deux places publiques pour le village de Vernayaz. Bien qu’opposées dans leur conception, elles témoignent de l’affinité des architectes pour une démarche qui amplifie certaines qualités des lieux transformés par projection ou association d’autres paysages.

Si l’on en croit les statistiques, le Valais est un canton à dominance rurale qui ne compte que huit villes pour un total de 126 communes; 34 d’entre elles ont même moins de 500 habitants. La réalité du territoire ne confirme pas cette interprétation. Les vallées principales sont des conurbations qui effacent les frontières communales, forçant les communes à repenser leur identité, notamment au travers de l’espace public. C’est le cas de Vernayaz, un village du district de St-Maurice, dont la proximité avec Martigny, Sion voire l’arc lémanique rend attractif. Sa municipalité a pris conscience de l’importance de développer la qualité de son espace public et du cadre de vie de ses habitants. Les deux places qui font l’objet de cet article en sont des exemples, elles illustrent aussi l’intérêt que représentent de tels mandats pour les architectes.

L’espace public représentativ, la Place du Centenaire
Comme son nom l’indique, la Place du Centenaire commémore le centième anniversaire de la création de la commune: un projet d’espace public identitaire offert aux Planains. Premier concours gagné et réalisé par Gay Menzel, la place est ouverte sur le paysage proche et sur la route cantonale. Une église catholique de style néo-gothique et son centre paroissial construit plus récemment en occupent l’arrière-scène. Derrière l’église se dressent les flancs escarpés et boisés de la montagne qui confèrent parfois à cette partie de vallée l’atmosphère oppressante d’un opéra wagnérien.

Des signes en bord de route
Le cœur excentré de la place est occupé par une surface circulaire concave de 18 mètres de diamètre en terrazzo de béton noir qui se remplit d’eau une fois par jour et rappelle la nappe phréatique qui monte souvent à Vernayaz. L’église et les falaises boisées s’y reflètent, renvoyant aux villageois une image de leur environnement tout en évoquant l’attrait qu’a pu exercer la montagne sur les touristes essentiellement anglais qui séjournaient à Vernayaz avant de rejoindre Salvan ou Chamonix à la conquête des sommets alpins au cours du XIXème siècle. Plus lointain encore, le passé marécageux de la vallée est symbolisé par l’ajout d’aulnes noirs dont certains poussent dans le bassin. Un mur crépi à couronne pointue traditionnelle les accompagne et créé un volume ombragé contrastant avec l’étendue de la place. Autrefois exposé le long de l’église, un bas-relief représentant trois saints est désormais encastré dans le mur à hauteur du bassin. À l’ombre des jeunes arbres, le mur invite à s’asseoir.
L’arrière de la place est mis en scène par le biais d’un monochrome blanc: enrobé, église et centre paroissial renvoient à la longue tradition chrétienne en Valais, un territoire traversé depuis le XIème siècle par les pèlerins de la Via Francigena. Au nord de l’église, le Jardin du curé avec ses parterres de lierres et trois bancs en béton évoquant des tombeaux renforce cette lecture symbolique de la place.
Sous une apparence sophistiquée, inhérente à la superposition de différents éléments paysagers historiques et de différents récits, la Place du Centenaire témoigne aussi d’un pragmatisme économique, à l’image de la mise en valeur d’éléments déjà présents ou du choix de matériaux rudimentaires et durables. La précision de leur mise en œuvre et l’ajout de quelques détails se chargent de lui conférer le caractère représentatif voulu.

L’espace public domestique, la Place du Pas
La Place du Pas est une place de quartier constituée de deux espaces et située au cœur de la partie ancienne de Vernayaz. Son caractère introverti et domestique la démarque de la Place du Centenaire, à l’image du chemin parcouru pour s’y rendre à travers d’étroites ruelles qui donnent l’impression d’être les vestibules des maisons qui les bordent à l’image des pots de fleurs, des tables et chaises ou des jouets qui les occupent.

Une démarche avec et pour les riverains
La Place du Centenaire composait un paysage ouvert et se prêtait aux transferts historiques et de sens: caractéristique d’une approche Top-down; la Place du Pas se présente discrètement, comme un lieu de voisinage, à l’abri des maisons villageoises qui la bordent et des habitants qui l’occupent: une approche résolument Bottom-up. La question se pose légitimement; un architecte est-il intervenu ici?
A l’époque, les chevaux traversant cette place devaient aller au pas. Les voitures s’y faufilent ou se garent de nos jours entre les bosquets d’arbres. Des érables rouges existants formaient à l’origine une couronne dans ce que Gay Menzel désignent comme le salon, par opposition au vestibule que constitue la partie ouest de la place qui sert essentiellement au stationnement et peut accueillir une grande tente. Les arbres existants ont été complété par quinze pins sylvestres, une essence indigène forestière transposée dans le village. Un bandeau continu de pavés en granit blanc relie les arbres et mène à une zone plus ombragée à l’ouest de la place. Le projet de sol est complété par un camaïeu d’enrobés respectant un parcellaire dessiné dans le but de prolonger les jardinets privés rangés le long des habitations limitrophes. Un mobilier de jardin mobile achève d’atténuer les limites entre public et domestique.

Un éclectisme responsable
Les deux places traduisent une forme d’éclectisme, une stratégie qui vise un sens nouveau en empruntant des éléments à différents systèmes. Chez Gay Menzel elle repose sur une approche paysagère à la fois sociale et romantique – au sens historique du terme – à laquelle s’ajoute une action consciente de la responsabilité que porte l’architecte lorsqu’il aménage des espaces ayant un impact social durable. Ils en profitent pour démontrer que la qualité n’est pas nécessairement affaire de budget.

Götz Menzel architecte et copropriétaire de Gay Menzel Sàrl sur Place du Centenaire:
«Des lampadaires à caractère urbain sont mis en place à proximi-té des arbres afin de les mettre en valeur une fois la nuit tombée,
comme une nature électrifiée.»
«La partie de la place revêtue par l’enrobé blanc sert de parvis à l’église et alloue une dimension. »


Catherine Gay Menzel, architecte et Copropriétaire de Gay Menzel Sàrl sur Place du Pas:
«Un patchwork d’enrobés exécutés selon différentes méthodes suit une logique parcellaire et fait de l’échelle de la petite propriété une référence.»

Texte: François Esquivié

Première publication: Magazine de la Documentation suisse du Bâtiment 2020 - 4

Entreprises impliquées dans le projet

Fournisseurs

Planification

192139517