Le climat d'abord! – Incitations à réfléchir
Pour une architecture de lutte contre le réchauffement climatique, rien de tel que retrouver certains fondamentaux. Lors du dernier Arc Afterwork à Lausanne le 6 septembre, il a surtout été question du recours à des matériaux écologiques, façon de se réconcilier avec la planète. Quatre conférenciers et autant d’approches se sont succédés, à l’appui de divers exemples pratiques, comme celui de la construction de l’écoquartier des Plaines-du-Loup.

Chaque conférencier avait une vingtaine de minutes pour présenter ses travaux et recherches devant un public de passionnés.
Résilience, force de conviction et volonté de briser les codes – trois aspects qui doivent guider les architectes dans leur travail contre le réchauffement climatique et les émissions de dioxyde de carbone. Septante professionnels de la construction ont pu découvrir au Musée olympique de Lausanne quatre approches et autant de défis lancés à leur secteur par la dégradation de l’état de notre planète. Coïncidence: le même jour de cet Arc Afterwork, les Nations Unies indiquaient que le climat terrestre était au bord de l’effondrement. Les recommandations des experts doivent par conséquent être mieux prises en compte quand il s’agit de construire de nouveaux bâtiments. Les architectes le savent bien, et les initiatives fleurissent, souvent sous l’impulsion des collectivités publiques.
À témoin, ces recherches menées par le bureau d’architecte lausannois Joud Vergély Beaudoin pour construire la nouvelle maison communautaire de l’écoquartier des Plaines-du Loup, sur les hauteurs de Lausanne. Un corps de quatre bâtiments imbriqués qui utilise la terre crue pour l’intérieur et un béton à base de chanvre et de chaux pour sa structure porteuse. Après une phase de tests très poussés, les nouveaux matériaux ont révélé leurs vertus. En termes de performance surtout. « La recherche de techniques innovantes est une formidable source de motivation pour les architectes », a indiqué Christophe Joud. Les architectes de cette future maison de quartier ont ainsi eu l’idée de faire une cabane dans un parc urbain. « Les analyses du terrain ont montré qu’il fallait ajouter plus de gravier au sable et au limon pour obtenir un matériau performant », a expliqué l’architecte Lorraine Beaudoin. La réflexion menée dans ce cadre s’est donc vite orientée vers l’adaptation du projet de base à la nature des matériaux choisis. Un changement de paradigme en architecture. La terre excavée a été criblée et dépierrée, avant d’être mise en charge. Pour l’ossature du bâtiment, ils ont utilisé du chanvre mêlé à un peu de chaux. Un matériau qui s’est montré parfaitement performant. Il se marie également très bien avec du bois, notamment pour les cadres de fenêtres.
L’architecte lausannois Nicolas de Courten a imaginé l’une des pièces urbaines des Plaines-du-Loup en travaillant à la fois sur la brique isolante de terre cuite et de pierre volcanique soufflée. Il a aussi joué sur l’enrichissement des vides. Densifier, ce n’est pas simplement construire davantage sur une petite surface, mais c’est également créer des espaces entre les bâtiments qui ont une réelle qualité. Et cette qualité doit exister, sinon l’aspect durable de la construction est mise en péril puisque les bâtiments non qualitatifs sont souvent détruits rapidement. «Nous devons aussi lutter contre les causes du réchauffement climatique», a affirmé le conférencier.
Retrouver la matière
Après ces cas pratiques, les participants à l’Afterwork ont pu prendre la mesure du défi climatique et de ses enjeux. L’architecte Véronique Favre, du bureau genevois FAZ, leur a enjoint de travailler sur ce qui est déjà en place pour se réconcilier avec notre planète. «Prendre soin des bâtiments et de l’environnement, décarboner, recourir à l’économie circulaire, faire mieux avec moins, militer pour la résilience font partie des pistes à explorer vers une construction durable», a-t-elle expliqué. Cela ne va pas sans se heurter à des difficultés, voire des tragédies. L’architecte Guillaume Yersin, du bureau d’architecture carougeois Saas Sàrl, a en partie souligné les péripéties rencontrées dans le cadre de la réhabilitation de bâtiments laissés à l’abandon. Leur ancienne activité n’est pas toujours compatible avec les meilleures intentions en faveur du climat, a-t-il expliqué à l’appui d’un projet de réhabilitation d’une ancienne tuilerie au sud de Genève, où il a fallu démonter un énorme four qui était devenu inutilisable.
Les participants se sont dit convaincus par ces deux heures de conférences. Même s’ils ont conscience de l’ampleur du chemin à parcourir pour construire en faveur de la défense de la planète. Les vieux réflexes, le souci du moindre coût et la volonté d’honorer les mandats dans les temps impartis ont la vie dure.

Le Musée Olympique offrait un cadre idéal pour les conférences L’apéritif dînatoire organisé à l’issue de la conférence a été l’occasion de discuter de l’importance de l’architecture face à la crise climatique.
Ces exposés intéressants et divertissants ont suscité un vif intérêt chez les hôtes. La discussion animée engagée avec le public à l’issue des conférences s’est poursuivie lors de l’apéritif dînatoire.
Cet article paraîtra dans l'Arc Mag 2024–1. Abonnez-vous dès maintenant pour recevoir prochainement le magazine dans votre boîte aux lettres.