Quand Meyrin se distingue.
Le prix Wakker, décerné par l’organisation «Patrimoine suisse» à une commune récompense des aménagements urbanistiques de qualité et respectueux du patrimoine bâti historique. Cette année, la commune genevoise de Meyrin s’est vue décernée le prix en montrant de manière exemplaire comment, par le dialogue, faire de la diversité un atout.

ⒸPierre Marmy
Meyrin, c’était jadis la pleine campagne, un bourg rural au milieu des champs. Pourtant, durant la période de l’après-guerre, on lui reconnait un potentiel autant social qu’architectural, et des espaces libres et généreux pour loger une population grandissante. Dans les années 60, la commune connaît une forte croissance démographique et construit massivement des barres d’immeubles. Meyrin crée alors la première cité satellite de Suisse. Elle a été bâtie afin de répondre à la pénurie de logements. La commune compte aujourd’hui 26 000 habitants. Depuis 1950, elle a vu sa population multipliée par douze et s’est développée dans un contexte difficile. Bordée par la frontière française et isolée des villes, elle est même pendant très longtemps considérée comme une cité-dortoir. Même si l’habitat y est dense, la commune regorge d’espaces. Riche de sa population toujours plus mixte et pluriculturelle, la commune s’est métamorphosée en une ville dynamique. Et c’est précisément en soignant son héritage, l’environnement et la qualité de vie, que Meyrin a trouvé tout au long de ces décennies les meilleures solutions pour affronter les défis et se développer sainement.
Créer des liens
Située entre le CERN et l’aéroport, Meyrin est parvenue à faire de cette diversité un atout prépondérant par des réalisations innovantes et une volonté constante de favoriser le dialogue avec sa population. D’abord, la commune a privilégié le noyau historique en préservant l’ancien village agricole. Les bâtiments maintenus ont été entretenus et adaptés aux nouveaux besoins. Des édifices classés comme la Villa du Jardin botanique alpin ou la Maison Vaudagne, actuellement en transformation pour des rénovations et des agrandissements, sont ouverts à la population. Affectés à des usages publics, ces bâtiments favorisent les rencontres au cœur de la commune. Des concours d’architecture ont donné lieu à quelques autres nouveaux bâtiments contemporains de qualité, comme l’École Les Vergers de Sylla Widmann Architekten. La cité satellite a aussi été conservée. Aujourd’hui, cet énorme ensemble a été rénové conformément aux critères du développement durable et densifié selon des normes de planification claires, principalement par des surélévations. Ces dernières ont permis de développer le vaste parc immobilier hérité des années 1960. Ainsi, la structure urbanistique est préservée et les espaces sont mis en valeur grâce à des mesures de modération du trafic et à des aménagements paysagers. L'héritage de ce complexe est impressionnant, témoignant d'un modèle de ville dédiée à l'automobile aujourd'hui obsolète.
L’importance d’un engagement citoyen
Parce que Meyrin privilégie un avenir durable, la commune a parallèlement connu un nouvel essor avec la construction d'un écoquartier modèle. Les Vergers, ce sont 1350 logements venus s'ajouter au parc immobilier, qui accueillent aujourd'hui 3000 habitants. Lors de la planification, Meyrin a mis l'accent sur une participation exceptionnelle de la population prenant en compte les trois piliers de la durabilité: social, écologie et économie. Le quartier est caractérisé par l'absence de voitures. D'ailleurs, tous les stationnements se trouvent dans le sous-sol de l'artère centrale piétonne et ceci génère en surface un quartier animé et passant. Un lieu de convergence à l'échelle de l'écoquartier est donc généré, il active les liens sociaux et favorise des modes de déplacement doux. Ce dispositif fait également la part belle au paysage en préservant des espaces de pleine terre. La population s'est engagée dans l'aménagement du site de l'écoquartier à travers divers processus participatifs. Des logements coopératifs et des offres publiques soutenues par la population contribuent ainsi à la vie du quartier. Le quartier est en outre autonome sur le plan énergétique, il produit lui-même son énergie grâce à des panneaux photovoltaïques. La chaleur résiduelle des entreprises, ainsi qu'une pompe à chaleur centrale chauffent l'eau sanitaire. L'électricité pour la pompe à chaleur est également fournie par les installations photovoltaïques.
Favoriser la biodiversité
Dans le nouveau quartier, Meyrin a rénové l’ancienne Ferme de la Planche et la mise à la disposition de la coopérative agricole urbaine des Vergers. Cette exploitation gérée par les habitants sensibilise la population aux produits locaux tout en participant à l’aménagement des espaces libres. Autre intervention importante sur le plan environnemental, la construction par la commune du lac artificiel des Vernes. Celui-ci contribue à la gestion des eaux dans la commune, constitue un biotope favorisant la diversité des espèces et offre à la population un espace de détente apprécié. Dans le domaine culturel, le Fonds d’art contemporain de Meyrin favorise l’émergence de nombreux projets artistiques dans l’espace public. La sculpture-paysage «l’Enfance du pli» est emblématique à cet égard. La commune mise sur une offre culturelle riche et indépendante, qui participe à l’identification du lieu et encourage les échanges. La commune de Meyrin est ainsi parvenue à concilié les aspirations de ses habitants avec les exigences de la nature et à créer une culture du bâti de qualité qui est synonyme de davantage de biodiversité pour la population locale. Pour tous ses atouts, elle s’est donc vu décerner la précieuse récompense.