Couture verte – Manuel Scholl et Matthias Krebs ont discuté du projet Ueberlandpark

Publié le 16 avril 2025 par
Jørg Himmelreich

Plus de 120'000 véhicules transitant sur l’A1 traversent en moyenne chaque jour Zurich Schwamendingen. Un bruit désagréable que l’on a tenté de réduire en enveloppant une portion de 950 mètres d’autoroute. Un parc a été aménagé sur le nouveau tunnel. Séparés depuis l’ouverture de l’autoroute en 1980, les deux pièces de tissu urbain que constituent Saatlen et le centre de Schwamendingen sont sur le point d’être recousues grâce aux nombreux escaliers, rampes et ponts de l’imposant ouvrage. Manuel Scholl et Matthias Krebs ont discuté avec Jørg Himmelreich du projet Ueberlandpark.

Matthias Krebs est partenaire du bureau d’architecture paysagère Krebs & Herde. Manuel Scholl est partenaire chez agps Architecture. | Photo: agps Architecture

Matthias Krebs est partenaire du bureau d’architecture paysagère Krebs & Herde. Manuel Scholl est partenaire chez agps Architecture. | Photo: agps Architecture

Matthias Krebs est partenaire du bureau d’architecture paysagère Krebs & Herde. Manuel Scholl est partenaire chez agps Architecture. | Photo: agps Architecture

Jørg Himmelreich Tout vient à point à qui sait attendre, un dicton qui semble bien convenir au recouvrement de l’autoroute à Schwamendingen. 25 ans séparent les premières initiatives populaires et la réalisation de l’ouvrage. Les architectes d’agps travaillent sur le projet depuis 2003, accompagné·e·s par les architectes paysagistes du bureau Krebs & Herde depuis 2007. Manuel Scholl et Matthias Krebs, alors que l’ouverture de l’Ueberlandpark se rapproche, êtes-vous contents de voir cette aventure se terminer, et satisfaits du résultat?

Manuel Scholl Très heureux de voir l’ouvrage achevé après de si longues phases de planification et de construction, mais aussi parce qu’il répond en de nombreux points aux attentes.

Matthias Krebs Il a fallu beaucoup d’endurance pour en arriver là. La sensation est comparable à celle du marathonien franchissant la ligne d’arrivée. La satisfaction de bientôt pouvoir parcourir un parc fraîchement planté là où l’autoroute créait une césure dans le quartier en est d’autant plus grande.

Photo: Mattia Lanini © Lombardi SA

Photo: Mattia Lanini © Lombardi SA

Photo: Mattia Lanini © Lombardi SA

J’aimerais revenir avec vous sur les prémices du projet, aborder ses aspects urbanistiques, architecturaux et paysagers, et évoquer la manière dont le parc et ses nombreux accès recoud le tissu urbain, ou, pour reprendre le titre de notre cahier, le rend plus poreux. Comment tout cela a-t-il débuté?

Manuel L’idée de mettre en place des mesures de protection contre le bruit existait déjà à l’époque de la planification de la bretelle d’autoroute urbaine. La solution économique de murs antibruit a notamment été envisagé. Et puis vingt ans après, des habitant·e·s du quartier décidaient finalement de fonder l’association «Verein Einhausung» et lançaient en 1999 une initiative populaire. Forte du soutien de 14'000 signatures, cette dernière réclamait comme mesure de protection la construction d’une structure d’acier et de verre. Des études montraient cependant qu’une telle construction était risquée et qu’il serait par ailleurs judicieux d’intégrer au périmètre de réflexion le quartier alentour afin d’en améliorer la condition. Trois variantes étaient proposées dans le cadre d’une étude test en 2003 / 2004. Et c’est finalement notre proposition d’une couverture en béton avec un parc au-dessus qui était sélectionnée.

L’Ueberlandpark constitue un nouveau niveau de la ville. | Photo: Raumgleiter
La photo montre l’état en 2006. | Photo: Gaëtan Bally

Le parc sera sans aucun doute magnifique! Je m’y suis rendu il y a quelques semaines. Il n’était que possible d’emprunter les chemins au niveau du sol, et très franchement, ma première réaction a été: plutôt imposant ce «mur de Berlin». Entre nous, abaisser la route n’aurait-elle pas été une meilleure solution?

Manuel Le choix de la solution à mettre en œuvre a été pris après avoir soigneusement soupesé différents aspects. L’équipe autour de Theo Hotz proposait effectivement la solution de l’enterrement, mais la présence du tunnel du tramway sous une partie de l’autoroute la rendait peu réaliste. Diener & Diener proposaient de sur- élever l’autoroute pour permettre une perméabilisation du sol. Les coûts plus élevés et la question de l’aménagement des espaces sous la route parlaient en défaveur de cette stratégie. Nous proposions de laisser l’autoroute au niveau du sol, de la recouvrir d’une surface libre praticable, de relier cette dernière au terrain environnant et d’aménager un passage généreux liant les quartiers.

Matthias La décision pragmatique – également motivée par des raisons économiques – d’opter pour une situation de plain-pied a certainement été alors la clé du succès politique qui permet aujourd’hui de libérer le quartier de l’autoroute. Les murs hauts, pour reprendre ta remarque, ne sont pas étrangers dans le paysage urbain zurichois. Ils sont d’ailleurs souvent liés à des rues, comme au Hirschgraben, ou dans le cas de la Hohe Promenade. Et la végétalisation répétée de portions de murs rythme cet ouvrage de près d’un kilomètre. Une sorte de jardin mural, avec des plantes grimpantes et des plantes couvre-sol, qui transformera l’enceinte en un lieu verdoyant à disposition du quartier.

Revenons à la conception de l’ouvrage; agps avait déjà l’expérience de projets liant architecture et infrastructure de transport. Quelle était votre expérience en la matière au moment d’entamer la planification de cet ouvrage?

Manuel Nous développons nos projets sur la base d’une analyse approfondie du contexte urbain, mais aussi des aspects technique, fonctionnel et procédurier. Les tâches et les lieux étant toujours différents, les solutions sont toujours spécifiques.

Passage souterrain de Saatlen avec rampes et escaliers menant au parc.| Photo: Gaëtan Bally
Coupe de principe | Visualisation: Raumgleiter

Le projet n’est pas seulement énorme, mais aussi complexe en raison des nombreux acteurs concernés – la Confédération, le Canton, la Ville, des architectes, ingénieur·e·s et paysagistes. L’exécution a été menée sous la houlette de l’Office Fédérale des Routes. La maîtrise d’ouvrage était-elle sensible aux questions d’aménagement?

Matthias La Suisse peut compter sur une grande tradition d’infrastructures soigneusement installées dans le paysage. Je pense notamment aux voies de communication historiques dans les Alpes, aux ponts ou encore aux centrales hydroélectriques. Nous avons pu nous appuyer sur cette tradition. Elle a notamment pesé dans la construction d’un langage commun aux concepteur·rice·s, aux différentes maîtrises d’ouvrage et aux ingénieur·e·s. Nous y sommes heureusement parvenus, comme le prouve l’enthousiasme développé par l’ensemble des participant·e·s. Nous savions toutes et tous qu’il s’agissait d’un projet unique.

Manuel La prise en compte des préoccupations architecturales et paysagères ne va pas de soi dans les projets d’infrastructure. C’était heureusement le cas ici dès le début. Il y avait une compréhension et un respect mutuels pour les préoccupations de chaque discipline, et la coopération entre les participant·e·s a très bien fonctionné. Nous avions toutes et tous conscience de la faisabilité et des coûts du projet, et cela a permis de discuter de qualités architecturales et de faire de cet ouvrage une plus-value.

Photo: Juliet Haller © Amt für Städtebau Zürich
Photo: Gaëtan Bally
Photo: Integral Axel Steinberger
Photo © Jakob Rope Systems

Jusqu’en 2006, le projet ne prévoyait qu’une végétalisation toute simple et quelques bancs. Mais les conceptions de ce que doit être un espace libre de qualité ont évolué depuis, et votre projet avec.

Manuel Le projet a dû faire face a beaucoup de critiques jusqu’au référendum de financement. Et puis la donne a complètement changé une fois cette étape passée. Grünstadt Zürich s’est alors mis en quête de paysagistes par le biais d’une procédure sélective en 2007. C’est avec Krebs & Herde – Rotzler Krebs à l’époque – que l’aménagement des espaces libres a vraiment pris du poids jusqu’à devenir un pilier important de l’équipe de planification.

Matthias L’accent n’avait jusque-là pas été mis sur la «végétalisation» du toit du tunnel. C’est nous qui, en faveur de la procédure de sélection, avons choisi d’interpréter le tunnel comme le support tridimensionnel d’un parc, «habillé» d’une végétation sur mesure enveloppant «couvercle» et parois.

Les structures d’habitat telles que les murs de pierres sèches, les tas de pierres, les surfaces sablonneuses, le bois mort et les nichoirs constituent l’infrastructure écologique. | Photo: Krebs & Herde
Photo: Juliet Haller © Amt für Städtebau Zürich

Le projet et son coût total de 440 millions de francs a fait l’objet de deux votes populaires. En septembre 2006, un crédit d’ouvrage de 39,8 millions de francs a été approuvé à 82,9 pour cent lors d’un référendum organisé par la ville de Zurich. Et en mars 2021, l’augmentation du crédit à un total de 83,8 millions de francs était approuvée à 84,6 pour cent. Un signe que les majorités peuvent être claires lorsqu’il s’agit d’investir dans l’aménagement d’espaces libres.

Matthias Depuis dix ans, l’intérêt pour les espaces non bâtis et leur valorisation dans le cadre de la densification urbaine a nettement augmenté. C’est un fait. En parallèle et en raison des vingt années nécessaires à la planification du projet, les attentes liées à l’Ueberlandpark ont naturellement évolué. Et à la base de cette évolution se trouvent le changement climatique et la crise de la biodiversité. Mais la rallonge de crédit a aussi permis de répondre aux attentes de la population en termes d’utilisation. Davantage d’arbres ont été plantés pour lutter contre les effets de la chaleur, et des fontaines et des pergolas ont pu être réalisées. De manière générale, l’aménagement du parc a été bonifié, notamment par le biais de la construction d’un pavillon comme marqueur spatial important.

Les différentes plantes ont été choisies en fonction d’une partition qui forme une succession d’espaces de couleurs et d’ambiances avec des séquences florales coordonnées et des textures de feuilles changeantes.| Dessin: Krebs & Herde, 2009

Les différentes plantes ont été choisies en fonction d’une partition qui forme une succession d’espaces de couleurs et d’ambiances avec des séquences florales coordonnées et des textures de feuilles changeantes.| Dessin: Krebs & Herde, 2009

Les différentes plantes ont été choisies en fonction d’une partition qui forme une succession d’espaces de couleurs et d’ambiances avec des séquences florales coordonnées et des textures de feuilles changeantes.| Dessin: Krebs & Herde, 2009

Qui utilisera le parc et comment à votre avis?

Manuel On craignait au début de ne voir personne s’aventurer là-haut. La tendance a finalement changé une fois que tout le monde a compris qu’un superbe complexe allait voir le jour. On a alors craint que trop de personnes ne veulent profiter du parc en même temps. La vérité se trouve certainement entre les deux. Nous nous réjouissons en tout cas d’une utilisation variée et espérons en même temps que le parc sera bien traité par ses utilisateur·rice·s.

Matthias Pour les riverain·e·s et la population du quartier, l’Ueberlandpark sera un espace de détente très facilement accessible pour des promenades quotidiennes, des petits jogging, ou encore comme lieu de rencontre pour les jeunes. L’expérience unique du «parc au bel étage» attirera en outre certainement des personnes de toute la ville, avides de promenade naturaliste ou vennues admirer le coucher de soleil depuis le belvédère d’Aubrugg.

Avez-vous essayé avec l’aménagement d’anticiper certaines formes d’utilisation future?

Matthias Un parc urbain qui fonctionne bien ne fait jamais l’objet d’une surdétermination programmatique. A contrario, il s’adresse à une large couche de la population et doit être en mesure d’attirer toutes les générations. C’est une règle qui valait hier et sera encore valable demain. La création de zones calmes et de zones animées pose les bases d’une utilisation socialement acceptable et attirant un large public. Nous avons sciemment renoncé à des tendances telles que le jardinage urbain, qui pour nous représente une revendication trop exclusive dans un parc public, et a plutôt sa place dans un environnement résidentiel de voisinage.

Aviez-vous des projets de référence qui vous ont inspiré?

Matthias La typologie du «parc en hauteur» ne compte pas beaucoup d’exemples. Au tout début, nous nous sommes bien entendu penchés sur la Highline à Manhattan et sur la Promenade Plantée à Paris. Si elles sont comparables du point de vue de leur disposition spatiale, elles sont avant tout conçues comme des «promenades décoratives» à vocation touristique. Ce n’était pas l’objectif recherché pour l’Ueberlandpark, pour lequel nous souhaitions un aménagement orienté vers l’utilisation, un lieu que les gens mais aussi la nature peuvent s’approprier.

Sur la terrasse de Saatlen, située au milieu du parc, un pavillon invite à se recueillir. Outre le café, il abrite une salle séparée pour les manifestations. | Visualisation: Tom Schmid

Sur la terrasse de Saatlen, située au milieu du parc, un pavillon invite à se recueillir. Outre le café, il abrite une salle séparée pour les manifestations. | Visualisation: Tom Schmid

Sur la terrasse de Saatlen, située au milieu du parc, un pavillon invite à se recueillir. Outre le café, il abrite une salle séparée pour les manifestations. | Visualisation: Tom Schmid

Comment s’organisent ces sections et quel type de mobilier trouvera-t-on?

Matthias Notre parc est conçu comme un collier de perles. C’est une enfilade de séquences permettant des utilisations différentes. Le récit d’une promenade linéaire commence avec le prélude accueillant de la forêt du Zürichberg débouchant sur le parterre de Schöneich et son «Silbergarten» (jardin argenté). On continue ensuite en direction de l’aire de jeux pour petits enfants équipée d’une pergola et agrémentée du «Goldgarten» (jardin doré). Puis on traverse la terrasse en gravillons de Saatlen sur laquelle se dressent une large fontaine et le pavillon. On traverse ensuite le paisible «Purpurgarten» (jardin pourpre) qui propose des bancs avant d’emmener à la Dreispitzplatz avec ses appareils de fitness et un toboggan qui fera la joie de celles et ceux voulant rejoindre le niveau de la ville en glissant. Une longue prairie bordée d’arbres mène au belvédère d’Aubrugg avec ses terrasses en bois, point d’orgue final au-dessus du portail du tunnel.

Dites-m’en plus au sujet de ce pavillon.

Manuel L’idée de le placer au milieu du recouvrement nous est venue en 2003. Mais c’est seulement lorsqu’il a fallu réfléchir à plus d’ombre et plus d’arbres que le pavillon a suscité suffisamment d’intérêt pour le réaliser au tout dernier moment, grâce au crédit supplémentaire de 2021. La toiture apparentée formellement aux rampes et aux escaliers est entièrement équipée de capteurs photovoltaïques et offre une protection contre le soleil et la pluie. Avec ses différents espaces, la construction en bois est flexible d’usage. Une petite restauration profite de places assises intérieures et extérieures, mais sert aussi des repas à l’emporter pour pouvoir ensuite profiter du parc.

Matthias Le pavillon est très important pour ce long parc. Au-delà du fait qu’il est un lieu à vocation sociale, c’est aussi une référence spatiale.

Albert Heinrich Steiner a planifié Schwamendingen comme une cité-jardin. Cela étant dit, les parcelles situées le long de l’autoroute n’ont intéressé personnes pendant quarante ans, et leurs constructions ont été négligées. Aujourd’hui, bon nombre d’entre elles sont sur le point d’être remplacées et la bande longeant le parc fait l’objet de projet de densification. Pensez-vous que le parc en hauteur et ces futures constructions doivent renouer avec le concept de cité-jardin?

Manuel Les ensembles de l’après-guerre étaient peu denses et la bâti a vieilli. La forte densification que va bientôt connaître le quartier va rendre caduque l’idée de cité-jardin. Mais l’offre d’un nouvel espace public de plus de trois hectares, l’Ueberlandpark compensera cela en quelque sorte.

Matthias On peut tout à fait qualifier le parc de réservoir d’espaces libres dédié aux futurs ensembles denses. Il offre une nature complémentaire et sauvage par rapport aux espaces verts et non-bâtis de la cité-jardin. Il faut aussi souligner que les projets de logements voisins du parc proposent des traductions intéressantes de l’idée de cité-jardin pour une densité plus élevée. À la verticale par exemple, avec des terrasses et des tonnelles étagées au lieu des surfaces plantées continues et des jardins familiaux de la cité-jardin traditionnelle.

BS + EMI Architektenpartner, Wohnsiedlung Neuwiesen, 158 logements pour la coopérative de construction Glattal, prévu pour 2028 | Visualisation: Zuend
Trachsler Hoffmann, Tulpenweg, 161 logements pour la coopérative de construction Süd Ost, prévu pour 2029 | Visualisation: Nightnurse
Penzel Valier und Robertneun, Über-Gärten, 228 logements pour Moyreal Immobilien AG, prévu pour 2026 | Visualisation: Penzel Valier und Robertneun

Il est aussi possible de relier les nouveaux bâtiments et le parc par des ponts.

Manuel Nous avions proposé cela au début, à titre optionnel. La ville les encourage désormais vivement. En cas de construction d’un pont entre le bâtiment et le parc, le plan d’aménagement prévoit notamment des taux d’utilisation avantageux pour les parcelles situées le long de la couverture de l’autoroute. L’offre est suffisamment intéressante et ne laissera aucune maîtrise d’ouvrage indifférente.

Matthias Pour les riverain·ne·s, de tels ponts représentent bien sûr un accès direct et privilégié au parc. Leur accessibilité semi-publique favorisera également l’animation de l’espace public en hauteur. Pour ne pas nuire aux qualités de l’Ueberlandpark, il reste néanmoins important que le positionnement des ponts et le tracé de leurs raccordements soit subordonné à l’aménagement du parc et aux arbres plantés.

Pouvez-vous dire quelques mots concernant la dimension constructive de l’ouvrage?

Manuel Nous avons dû combiner deux différents types de construction. Afin de ne pas transférer de charges inutiles sur le tunnel de tramway qui passe sous l’autoroute, la portion située entre le tunnel de Schöneich et le passage sous-voie de Saatlen, des poutres préfabriquées en béton relativement fines et légères enjambent l’ouvrage sur toute sa largeur. Ensuite et jusqu’au portail d’Aubrugg, la construction en béton coulé sur place est plus robuste et supporte des charges plus importantes.

Matthias Ces différentes conditions statiques et constructives ont naturellement influencé la répartition du substrat nécessaire au développement de la végétation. 40 centimètres ont pu être versés par endroits sur la partie constituée de poutres préfabriquées, et pas moins de 90 centimètres au-dessus de la structure en béton coulé sur place. Très peu somme toute pour un parc planté. Nous avons cependant développé un substrat de végétation minéral composé de différentes couches de sol, qui doit guider les racines en profondeur avec un meilleur approvisionnement en eau, et permettre à une végétation durable de s’établir.

Pas une tâche facile, sachant que le parc ne doit pas être irrigué.

Matthias La plantation de ce «rocher artificiel en béton» et sa profondeur de substrat limitée a relevé du défi. Nous avons dû procéder à un choix d’associations végétales mélangeant des plantes issues de régions chaudes et sèches et d’autres habituées aux sites rocheux peu profonds, tels que nous les connaissons dans le Jura, les forêts sèches du sud de l’Europe et la steppe rocheuse valaisanne. Cette végétation pauvre se compose de variétés de chênes résistantes à la sécheresse, de frênes à fleurs, de saules oléagineux, d’hêtres à houblon et de pins, en combinaison avec des haies de genêts et de roses sauvages ou encore avec des jardins de steppe mélangeant chardons boule, pavots, euphorbes, iris, fenouils de montagne et pâturins aimant la chaleur. Toutes ces plantes sont les garantes de l’atmosphère méridionale paisible du parc.

Quelle est la stratégie choisie pour offrir des habitats à différentes plantes et animaux?

Matthias La relève des défis climatiques et la promotion de la biodiversité passent par la mise en œuvre des conditions nécessaires à une grande diversité d’espèces. Dans un contexte urbain comme le nôtre, l’adéquation au site et la résilience climatique des plantes sont prioritaires par rapport à leur origine géographique. Plus concrètement, l’Ueberlandpark offre une mosaïque d’habitats variés comme base de vie pour les insectes et les reptiles, avec des prairies pionnières, des prairies sèches, des haies sauvages et des structures d’habitat écologique composées de bois mort, de sable et de plus d’un kilomètre de murs en pierres sèches.

Les plantes ont été choisies de manière à favoriser la biodiversité et à attirer toutes sortes de petits animaux. Le diagramme montre les types de biotopes et les espèces cibles. | Dessin: Dani Pelagatti / Bunterhund

Les plantes ont été choisies de manière à favoriser la biodiversité et à attirer toutes sortes de petits animaux. Le diagramme montre les types de biotopes et les espèces cibles. | Dessin: Dani Pelagatti / Bunterhund

Les plantes ont été choisies de manière à favoriser la biodiversité et à attirer toutes sortes de petits animaux. Le diagramme montre les types de biotopes et les espèces cibles. | Dessin: Dani Pelagatti / Bunterhund

Supposons que les acteur·rice·s de la Confédération, du canton, de la ville, du quartier et la population soient aujourd’hui amené·e·s à se prononcer sur la réalisation d’un tunnel hors-sol qui a nécessité 65 000 mètres cubes de béton. Serait-il validé alors qu’une majorité est aujourd’hui consciente des risques liés à la crise climatique?

Manuel Cette question est justifiée. Il y a 15 ans, lors du dépôt de l’autorisation, l’OFROU n’envisageait aucune alternative en termes de matériaux. Des efforts ont entre-temps été faits pour obtenir un béton plus écologique et pour mettre en œuvre d’autres matériaux destinés à la construction de couvertures de voiries. L’avenir nous dira comment évoluera le cadre autorisé ou les restrictions en matière d’affectations publiques en liaison avec de tels ouvrages.

Matthias Absolument. L’énergie grise reste un casse-tête. Cela étant, je suis d’avis qu’il serait judicieux de combiner de futures couvertures d’autoroutes avec des espaces verts et des parcs publics répondant aux défis climatiques et écologiques. Et cela sous-entend la construction de structures massives et résistantes d’un point de vue statique. Considérée sur une longue période, l’utilisation de ces ressources est justifiée par les avantages écologiques, climatiques et sociaux qu’offre cette infrastructure verte et bleue.

Quand pourra-t-on enfin parcourir le parc?

Manuel La cérémonie d’ouverture officielle est prévue le 9 mai en présence de représentant·e·s de la Confédération, du Canton et de la Ville. Une fête d’ouverture au public sera organisée le samedi 10 mai.

Matthias Cette fête, c’est avant tout celle d’un quartier qui, après quarante années d’engagement politique, a fini par atteindre son objectif. Mais c’est aussi une fête de la diversité naturelle. On a dénombré plus de 165 espèces animales peu de temps après le début des plantations et de l’ensemencement. Un bon nombre sont des espèces rares, voire exigeantes en termes de milieu, comme certaines espèces d’abeilles sauvages, de guêpes ou de papillons. Et cela ne nous laisse pas indifférents, bien au contraire!

L'article est disponible dans le Swiss Arc Mag 2025–2 et traduit en français par François Esquivié. Commandez votre exemplaire ici.

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